LA DISSERTATION
Le mot clé est problème. Il s’agit de voir derrière une question courte en apparence simple : le sujet, un problème complexe que l’on ne peut en aucun cas résoudre à première vue. Il faut donc montrer une opposition absolue : thèse / antithèse ; et dépasser ce problème en montrant que thèse et antithèse sont fausses, incomplètes, et ne portent pas sur le vrai fond du problème. Si vous ne voyez pas de problème face à la question posée, si pour vous la réponse est simple et évidente, si vous ne traitez que le pour ou que le contre, alors ce n’est pas une dissertation de philosophie. La philosophie s’oppose en effet essentiellement à l’opinion : il ne s’agit pas d’affirmer un point de vue (la seule chose que je sais, c’est que je ne sais rien) mais au contraire de montrer que l’opinion de départ est fausse, que l’opinion contraire est tout aussi vraie, et d’essayer de s’élever à un point de vue supérieur, qui n’est plus une simple opinion mais une forme de savoir. La philosophie est donc essentiellement dialectique (Platon écrivait ainsi des dialogues). Le meilleur moyen d’être sûr que la dissertation soit philosophique est donc de suivre une méthode et un plan dialectique. Un plan thématique est également possible mais il ne faut en aucun cas consacrer une partie à un mot du sujet : chaque partie doit répondre au sujet dans son ensemble, et il choisir les thèmes de telle manière qu’à l’arrivée, toutes les positions sur le problème aient été vues (si l’on n’a vu qu’un côté de la question, le problème n’est pas posé, alors que c’était le but de l’exercice). Un plan thématique est donc encore plus risqué. Dans tous les cas, il faut faire preuve de méthode, notemment dans le travail au brouillon, pour élaborer un bon plan et donc pouvoir faire bon devoir (c’est la condition nécessaire).
Méthode est ici aussi un mot clé. La réussite de cet exercice en 4h repose sur l’analyse parfaite d’un sujet de quelques mots. Manquer de méthode, ne pas suivre les étapes pas à pas, et se précipiter sans analyse suffisante du sujet condamne au principal écueil : le hors sujet, très courant en philosophie.
AVANT LA REDACTION :
Consacrez 1h à 1h30 sur les 4h :
- à lire de nombreuses fois le sujet, armé d’un stylo, en analysant chaque terme, sans se précipiter dans le faux sens, le contre sens, qui vous condamnent d’avance au hors sujet. Si pour vous il y a une réponse évidente au sujet c’est que vous n’avez pas encore vu le problème. Il faut chercher la difficulté sur laquelle repose le sujet : une contradiction dans les termes, dans les notions philosophiques mobilisées par le sujet, un paradoxe qui résulte du sujet. C’est ce qui va vous permettre de voir le problème. Cherchez aussi un mot ou une tournure ambiguë, c’est souvent en jouant sur un double sens qu’on peut dépasser, en abandonnant le sens de départ où se jouait l’opposition.
- à dégager des questions que pose le sujet de manière à former un problème, une aporie.
- à dégager une problématique qui montre que vous avez compris le problème principal du sujet
- à chercher le présupposé du sujet, le sous-entendu, ce qui est présenté comme une évidence ou qui semble remettre en question ce qui serait le plus évident.
- à rassembler au brouillon les idées, les opposer, et dégager celles pouvant servir à dépasser cette opposition. Formulez pour chaque future partie une affirmation claire sur le problème.
- à organiser les idées : il faut partir du plus évident, du plus simple, et le contrer ensuite avec du plus complexe, jamais l’inverse sinon ce n’est plus du simple mais du simpliste et on ne contre rien : ça tombe à plat.
- à rédiger l’introduction et la conclusion au brouillon.
STRUCTURE DE LA DISSERTATION
Faites un alinéa et commencez l’introduction en partant d’un exemple littéraire, quotidien ou factuel (social, historique, économique) permettant d’introduire le sujet (qui n’a pas à apparaitre avant la fin de ce paragraphe sur la copie) : « la question se pose ainsi : [sujet] » (10 l.)
Faites un alinéa et, dans ce deuxième paragraphe d’introduction, Analyser les termes du sujet pour éviter le hors sujet, permettre de poser clairement le problème (et plus tard le dépasser). Dégagez ce problème par une série de questions dont la dernière est la problématique principale. (10 l.)
Faites un alinéa et dans ce troisième paragraphe d’introduction, Annoncer le plan avec des affirmations successives sur le problème organisées en Thèse antithèse synthèse : affirmation de l’évidence de départ, affirmation de l’exacte contraire (controverse), en III affirmation sur le sujet depuis un point de vue supérieur (dépassement de l’opposition). Ex : « Dans un premier temps nous verrons que [affirmation I], dans un second temps nous verrons que [affirmation II], enfin nous verrons que (quoi qu’il en soit/avant tout/plus fondamentalement) [affirmation III qui dépasse I et II] » (Restez énigmatiques sur la synthèse sans être sibyllin) (10 l.)
(Passer un quart de page entre introduction et développement)
Faites un alinéa et commencez votre premier paragraphe avec votre premier argument et ajoutez-y votre premier exemple ou référence pour appuyer l’argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez votre deuxième paragraphe avec votre deuxième argument et ajoutez-y votre deuxième exemple ou référence pour appuyer l’argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez votre Ne paragraphe avec votre Ne argument et ajoutez-y votre Ne exemple ou référence pour appuyer l’argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez par « Mais » une phrase de transition vers l’antithèse.
(Passer un huitième de la page entre deux parties du développement)
Faites un alinéa et commencez votre premier paragraphe avec votre premier contre-argument et ajoutez-y votre premier contre-exemple ou référence pour appuyer le contre-argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez votre deuxième paragraphe avec votre deuxième contre-argument et ajoutez-y votre deuxième contre-exemple ou référence pour appuyer le contre-argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez votre Ne paragraphe avec votre Ne contre-argument et ajoutez-y votre Ne contre-exemple ou référence pour appuyer le contre-argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume le contre-argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez par « Mais (quoi qu’il en soit/avant tout/plus fondamentalement) » une phrase de transition vers la synthèse.
(Passer un huitième de la page entre deux parties du développement)
Faites un alinéa et commencez votre premier paragraphe avec votre premier argument et ajoutez-y votre premier exemple ou référence pour appuyer l’argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne) (15 l.)
Faites un alinéa et commencez votre deuxième paragraphe avec votre deuxième argument et ajoutez-y votre deuxième exemple ou référence pour appuyer l’argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (Allez à la ligne sans passer de ligne)… (15 l.)
Faites un alinéa et commencez votre Ne paragraphe avec votre Ne argument et ajoutez-y votre Ne exemple ou référence pour appuyer l’argument. Terminez le paragraphe par une affirmation qui résume l’argument et montre qu’il répond clairement et directement au sujet. (15 l.)
(Passer un quart de page entre développement et conclusion)
Faites un alinéa et résumez la progression du développement en détaillant davantage encore qu’en introduction, insistez sur l’aboutissement (synthèse). (15 l.)
Faites un alinéa et ouvrez sur une question liée au problème comme préalable ou comme aboutissement. « Ne faut-il pas d’abord/alors se demander si… ? »
L’EXPLICATION DE TEXTE
Concrètement il s’agit avant tout d’expliquer le texte, tout le texte, et rien que le texte, comme le rappelle la consigne : « La connaissance de la
doctrine de l’auteur n’est pas requise. Il faut et il suffit que l’explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question. » Mais qui dit
problème dit pour et contre. La bonne explication de texte est celle du candidat qui, sans en faire étalage, connaît le contexte, ce qu’il y a autour, ce à quoi fait référence l’auteur, ce
qui a été dit avant, après, etc. Il faut autant de connaissances que pour une dissertation : pour rendre compte du problème il faut savoir d’où vient ce problème, ce qui a été soutenu
sur ce problème avant et/ou après dans l’histoire de la philosophie. Ainsi, bien qu'on ne vous demande ici qu'une explication ligne à ligne du texte, il ne s’agit pas de se contenter de reformuler maladroitement le texte : paraphrase. Ce qu’on veut, c’est tout sauf un survol
superficiel. Ce qu’on veut, c’est que vous soyez capable de restituer la logique précise du texte, ce que dit précisément l’auteur et à travers quelles étapes. La paraphrase
est donc le premier écueil à éviter, d’autant que le correcteur se dira que le candidat a choisi le texte par faiblesse en pensant à tort se dispenser des connaissances philosophiques nécessaires
à la dissertation. En effet, le texte ne doit pas seulement être compris mais expliqué (déployé dans toutes ses articulations logiques), voire commenté : il faut l’interroger,
en montrer les limites, les présupposés idéologiques, mais le risque est alors de disserter autour du texte en perdant de vue le texte. Le deuxième écueil à éviter est alors le hors sujet,
d’utiliser le texte comme prétexte à dissertation (et qu’on ne voit plus le rapport au problème du texte) ou encore de partir sur des détails sur la vie et l’œuvre de l’auteur sans rapport
au problème (biographisme) : « La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise. »
La structure qui s’impose pour éviter les deux principaux écueils (paraphrase et hors sujet) est donc de commencer par l’analyse du problème auquel le
texte répond (dans l’introduction), et de réserver le développement à l’analyse linéaire et détaillée du texte, en consacrant chaque partie à un moment structurel du texte et
chaque paragraphe à une sous partie de ce moment du texte, le tout en respectant toujours l’ordre du texte. Tout au long (et jamais à part) de cette explication, il s’agit aussi de
montrer l’intérêt du problème philosophique dont il est question en commentant de manière critique, c’est-à-dire en délimitant le point de vue qui est le sien en montrant qu’il
représente une position sur un problème et que d’autres positions s’y opposent ou qu’il s’oppose à d’autres (mais attention à ne pas trop s’éloigner du texte). Il ne faut « jamais séparer
l’analyse formelle » (explication de la logique) « d’un souci de compréhension de fond » (critique).
Enfin : L’explication consiste avant tout à montrer, en dépliant toutes les étapes du texte, ce qu’il dit vraiment, pas ce à quoi il fait penser ou ce qu’il évoque (il ne s’agit pas d’un commentaire composé de français). Ne parlez donc pas de champs lexicaux, etc. : ce serait une confusion des genres.
AVANT LA REDACTION :
Consacrez 1h à 1h30 sur les 4h :
- à lire de nombreuses fois le texte pour comprendre non seulement de quoi il parle (thème), de quel problème il traite, et aussi ce qu’il soutient sur ce problème (thèse) (On ne comprend rien souvent au début, ensuite c’est encore pire : on croit comprendre une logique apparente mais ce n’est pas ça (faux sens) voire même on comprend exactement à l’envers (contre sens))
- à repérer la thèse du texte si elle est formulée ou à la formuler vous-même. Il doit s’agir d’une affirmation sur le problème dont il est question.
- à entourer les connecteurs logiques (donc, ainsi alors, par conséquent ; mais, pourtant, cependant ; car, parce que, puisque)
- à « découper » le texte en différents moments. Le nombre de parties de votre développement, souvent 2 ou 3, dépend bien sûr du texte et de votre découpage.
- à distinguer les exemples des arguments ; les digressions du problème principal.
- à noter en marge les distinctions philosophiques utilisées par l’auteur (théorie/pratique)
- à repérer les références philosophiques, le philosophe à qui l’auteur s’oppose sur ce problème, ceux sur qui il s’appuie, ses présupposés idéologique (il est matérialiste donc pour lui pas de vie après la mort, voilà pourquoi il dit que la mort n’est pas à craindre), ce qui serait la thèse contraire (que disent les idéalistes/spiritualistes sur ce sujet ?)
- à rédiger l’introduction et la conclusion au brouillon.
STRUCTURE DE L’EXPLICATION DE TEXTE
Faites un alinéa et commencez ce premier paragraphe de l’introduction en partant d’un exemple littéraire, quotidien ou factuel (social, historique, économique) portant sur le thème et le problème du texte pour introduire ce dernier : terminez le paragraphe par quelque chose comme : « c’est cela que [nom de l’auteur] veut résoudre dans [nom du texte] » (10 l.)
Faites un alinéa et, dans ce deuxième paragraphe de l’introduction, Analyser le problème précis sur lequel le texte prend position et souligner son intérêt, son importance, sa complexité par une série de questions dont la dernière est la problématique principale à laquelle le texte répond. (10 l.)
Faites un alinéa et, dans ce troisième paragraphe de l’introduction, Annoncer la thèse du texte, qui doit être une affirmation, et les étapes logiques logiques (moments) à travers lesquels l’auteur soutient cette thèse (ces moments du texte devront correspondre aux différentes parties de votre développement) (10 l.)
(Passer un quart de page entre introduction et développement)
Faites un alinéa et commencez votre premier paragraphe en expliquant la première phrase du premier moment de l’extrait (ou membre de phrase, mais qui doit constituer une unité de sens). Citez le passage en question. Définissez éventuellement des termes importants, ou illustrez par un exemple les affirmations les plus abstraites, ou soulignez une difficulté… Terminez le paragraphe par une phrase qui résume ce que dit l’auteur ici.
Faites un alinéa et commencez votre deuxième paragraphe en expliquant le lien de la deuxième phrase du premier moment de l’extrait par rapport à ce qui précède immédiatement. Citez le passage en question. Définissez éventuellement des termes importants, ou illustrez par un exemple les affirmations les plus abstraites, ou soulignez une difficulté… Terminez le paragraphe par une phrase qui résume ce que dit l’auteur ici.
Faites un alinéa et commencez votre Ne paragraphe en expliquant le lien de la Ne phrase du premier moment de l’extrait par rapport à ce qui précède immédiatement. Citez le passage en question. Définissez éventuellement des termes importants, ou illustrez par un exemple les affirmations les plus abstraites, ou soulignez une difficulté… Terminez le paragraphe par une phrase qui résume ce que dit l’auteur ici.
(Passer un huitième de la page entre deux parties du développement)
Faites un alinéa et commencez votre premier paragraphe en expliquant précisément le lien de la première phrase du second moment de l’extrait par rapport à ce qui précède immédiatement (pourquoi changez vous de partie ?). Citez le passage en question. Définissez éventuellement des termes importants, ou illustrez par un exemple les affirmations les plus abstraites, ou soulignez une difficulté… Terminez le paragraphe par une phrase qui résume ce que dit l’auteur ici.
Faites un alinéa et commencez votre deuxième paragraphe en expliquant le lien de la deuxième phrase du second moment de l’extrait par rapport à ce qui précède immédiatement. Citez le passage en question. Définissez éventuellement des termes importants, ou illustrez par un exemple les affirmations les plus abstraites, ou soulignez une difficulté… Terminez le paragraphe par une phrase qui résume ce que dit l’auteur ici.
Faites un alinéa et commencez votre Ne paragraphe en expliquant le lien de la Ne phrase du second moment de l’extrait par rapport à ce qui précède immédiatement. Citez le passage en question. Définissez éventuellement des termes importants, ou illustrez par un exemple les affirmations les plus abstraites, ou soulignez une difficulté… Terminez le paragraphe par une phrase qui résume ce que dit l’auteur ici.
(Passer un quart de page entre développement et conclusion)
Faites un alinéa et résumez la progression logique du texte en détaillant davantage encore qu’en introduction et en insistant sur ce qu’il établit. (15 l.)
Faites un alinéa et ouvrez sur une question ayant un lien avec le problème : soit comme préalable soit comme aboutissement. « Ne faut-il pas d’abord/alors se demander si… ? »
AUTRES CONSIGNES SUR CES EXERCICES :
Un paragraphe commence par un alinéa et correspond à une idée (et son exemple) en dissertation ou à une unité de sens (en explication). Souligner les titres d’œuvres, soigner particulièrement introduction et conclusion, garder du temps (et du courage) pour se relire.